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L'ENVERS DU DECOR D'UNE VALORISATION DE PME

  • Photo du rédacteur: Thomas DRAGUET
    Thomas DRAGUET
  • il y a 6 heures
  • 8 min de lecture

“L’AUDACE EN AFFAIRE EST LA PREMIÈRE, LA DEUXIÈME ET LA TROISIÈME CHOSE LA PLUS IMPORTANTE”

Proverbe Anglais


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Selon une étude de McKinsey, la durée de vie moyenne des entreprises du S&P 500 est passée de 61 ans en 1958 à moins de 18 ans aujourd'hui.  Plus que jamais la faculté d’adaptation représente le premier facteur de pérennité.


Le constat de cette durée de vie à une incidence directe sur la valeur de nos PME,  on peut résumer à 3 principales méthodes qui sont fréquemment utilisées pour déterminer le prix des actions d’une PME ;


- Multiples de l’EBITDA ;

- Discounted Cash-Flow (DCF) ;

- Actif net corrigé.


Les deux premières étant applicables à des sociétés de production et/ou de services, la dernière étant plus appropriée pour les entreprises détenant des immeubles et/ou des actifs présentant des valeurs comptables faibles comparativement à une valeur réelle (marché) élevée.


Elles partagent toutes les 3, le même talon d’Achille, à savoir qu’elles visent à simplifier l’estimation dans le sens où elles n’intègrent pas les finesses de l’évolution des affaires dans le temps.


Pour tenter d’y parvenir,  le candidat s’accordera le temps nécessaire d’établir un plan financier (3-5 ans) reprenant les projections détaillées et variables pour parvenir à jauger les effets de différents événements pouvant impacter la valeur de l’entreprise à céder.


  1. LE PRÉALABLE À L’UTILISATION DE CES MÉTHODES


On devrait suggérer à chaque entreprise de présenter à ses actionnaires, un compte de résultat qui distinguerait, en deux colonnes, le récurrent du reste.


Or c’est plutôt l’inverse qui s’est produit, on a même vu les charges et produits “exceptionnels” disparaître. Mais exceptionnel ne se compare pas forcément au non récurrent.


Quand on “normalise” le résultat,  on cherche à conserver les revenus et charges appelés à se reproduire dans le temps et écarter ceux isolés/sporadiques.


En analysant le bilan d’une entreprise,  la rubrique #74 “Autres produits d’exploitation” regorge de revenus non récurrents,  comme des ventes et plus-values d’actifs, subsidiations, etc.


Les projections réalistes pour apprécier la faisabilité d’une reprise d’entreprise,  doivent se baser sur compte de résultat “normalisé”, càd expurgé de ce qui n’est pas appelé à se reproduire.   


Ce qui n’empêche pas de prévoir un facteur “imprévu“ à l’aide d’une variable.

Les revenus one-shot ou d’aubaine et à l’inverse les coups durs, doivent être identifiés et écartés d’un plan d’affaires de reprise qui servira de base aux méthodes d’évaluation.


L’objectif étant de déterminer, ce à quoi on peut raisonnablement s’attendre comme bénéfice à l’épreuve du temps.


  1. LES PRINCIPALES DÉMARCATIONS ENTRE CES MÉTHODES


    I. Multiples de l’EBITDA


a) EBITDA


L’EBITDA = bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements.


Vous aurez besoin de ces éléments ;

  1. Retenir un multiple qui soit réaliste en regard de résultats réalisés et potentiels mais aussi de tous les facteurs liés à l’écosystème de la PME ;

  2. Chiffrer la trésorerie (ou l’endettement) net.


Mais finalement quel est le multiple pertinent à retenir pour la valorisation ? C’est bien souvent à ce niveau que le premier point de discorde, entre acheteur et vendeur, se manifeste.


Le principe du multiple consiste à dire que le résultat peut au minimum se reproduire x fois dans le futur. Il sera plus aléatoire de prendre le secteur utilisé dans un même secteur, car potentiellement moins pertinent en fonction de l’entreprise réellement concernée par la valorisation.


Ces facteurs vont accroître le multiple EBITDA à utiliser ; 

- Un fonctionnement autonome de l’entreprise ;

- Des perspectives florissantes ;

- Un secteur très prometteur (exemple : intelligence artificielle, EBITDA x20) ;

- Des potentielles réductions de coûts qui n’entravent pas le bon fonctionnement ;

- Etc.


Ces facteurs vont réduire le multiple EBITDA à utiliser ; 

- L’ éventuelle (hyper-)dépendance de la PME à sa/son dirigeant(e) ;

- Un secteur en perte de vitesse (exemple : presse écrite,  EBITDA x1 ) ;

- La situation stagnante de l’activité de la société ;

- Une équipe sous pression ;

- Un niveau de coût inférieur à la réalité ;

- La rémunération sous évaluée du/des dirigeant(e/s) ;

- Etc.


Oui il existe des points de repères, des sociétés qui font un benchmark des transactions de sociétés ou associations non-cotées, parmi lesquelles ;


- Argos (lien)

- Wallonie Entreprendre (lien)

- Vlerick (lien)

- Etc.


Comme toutes les données globalisées,  elles sont à prendre pour ce qu’elles sont, des bons indicateurs sans être le Guide Suprême duquel on ne dévie jamais.  


Etant donné que chaque cas est différent et que les moyennes sont dangereuses quand on les applique indifféremment à une entreprise de pompes funèbres ou à une autre spécialisée dans l'aérospatiale.


b) L’importance de cerner la réelle trésorerie/dette nette 


Cette méthode ne doit pas se résumer à multiplier l’EBITDA,  car ce serait faire abstraction de l’endettement ou de la trésorerie nette.


En effet,  l’EBITDA intègre revenus, coûts directs, généraux et de personnel mais pas l’endettement bancaire/autres alors que celui-ci affecte aussi le cash-flow.


Dès lors, la deuxième partie de l’évaluation, s’axe sur le fait de déterminer quel montant à retrancher du premier facteur (EBITDA x multiple) pour apprécier les cash-flow disponibles, ce qui représente la potentielle création de richesse par la société (et donc la valeur de ses actions).


En d’autres termes,  si vous retenez un multiple de 6,  à vous de déterminer dans les 6 prochaines années ;


- Est-ce que la société aura amassé un excédent de trésorerie (qu’elle ne va pas devoir consacrer à de l’investissement, du recrutement, un bouclier d’épargne, etc) ;

- (-) A combien s'élèvera le remboursement total de la dette bancaire ;

- (-) Idem pour les autres dettes (non commerciales), par exemple une avance actionnaire ;

- A terme, quelle sera la situation de l'endettement subsistant ;

- Etc.


c)  Enterprise Value (EV)


La valeur de l’entreprise(EV) s’obtient donc :  (a : Ebitda x Multiple) +/- (b : Dette/Trésorerie nette).


Les angles morts de cette approche ;


- La méthode des multiples de l'EBITDA n'est pas impactée, entre autres, par les impôts sur le résultat ni la structure de coût d’endettement de la société,  alors que ce sont deux paramètres bien réels qui amputent le cashflow.  


Ce qui veut dire que la réelle mesure de création de valeur nette, la dernière ligne du résultat, n’est pas vraiment prise en compte pour différentes raisons et pas forcément les meilleures.


- Les variations dans le besoin de fonds de roulement ne vont pas être rendues visibles, sauf à faire des projections détaillées.


- Les investissements (CAPEX) et la croissance sont également négligés dans cette approche.


II. Discounted Cash-Flow (DCF)


Cette méthode est moins utilisée que la première mais présente comme avantage qu’elle tient compte du résultat (final) réellement distribuable, en faveur des actionnaires (et ainsi reconstituer min. le montant investi).


Il existe une tendance à accorder plus d’importance aux flux de trésorerie,  ce que relève potentiellement bien cette méthode.


III. Actif Net Corrigé


Celle-ci est principalement utilisée pour valoriser des sociétés détenant des immeubles.


Cette méthode vise à impacter les fonds propres (actif net, equity) de ces éléments ;


  • (+) Des plus-values latentes sur les immeubles détenus par la société ;

  • (-) Déduire la (1/2) moitié des impôts latents ;

  • = Obtenir la valeur des actions de la société “immobilière”.


Pourquoi on ne déduit que la moitié des impôts latents ?  Parce que l’acheteur (des actions) fera l’économie des droits d’enregistrement, l’usage veut qu’on considère que vendeur et acheteur font donc une économie fiscale attractive potentiellement comparable.


Sur ce sujet, à lire en détails : “IMMEUBLE EN SOCIÉTÉ, STOP OU ENCORE ?”


  1. CE QUI EST ABSENT OU APPELÉ À DISPARAÎTRE


Il est souvent moins évident de relever ce qui manque quand ce n’est pas forcément une évidence.  Pourtant cette absence représente un abaissement/affaiblissement de la valeur de l’entreprise.


Par exemple ;


- Une entreprise qui gère mal ou même pas du tout son “cut-off”,  càd le fait de bien distinguer par période, ses revenus et charges.  Ce sera le cas d’une facturation de services sous forme d’abonnements de 12 mois mais étalé sur deux années civiles différentes, sans reporter une partie de ces revenus sur l’exercice suivant ;


- Quand le dirigeant(e) ne se rémunère pas ou très faiblement alors que si vous deviez faire appel à un directeur(ice) pour le remplacer, un coût évident substantiel trouverait à s’appliquer ;


- Lorsque l’entreprise bénéficie de faveurs, notamment lorsqu’elle occupe des locaux appartenant au vendeur mais en payant un loyer minoré ;


- Mettre le doigt sur des non-valeurs est aussi important pour expurger du patrimoine ce qui ne représente rien de concret, comprenez tout ce qui ne peut réellement devenir “liquide” (cessible).  Bien souvent les actifs incorporels comportent des éléments de cette nature,  ils ont généré un coût d’investissement pour l’entreprise, mais celui-ci n’aura que peu de valeur si on tente de céder l’actif à un tiers.


- Parmi d’autres non-valeurs : des avances que la société a faites à son actionnariat (qui n’envisage pas de rembourser).


- Etc.


  1. LES RISQUES LATENTS


Certaines menaces ou défis ne sont pas forcément matérialisés au moment où une cession d’entreprise s’initie.  Pourtant rapidement les choses peuvent basculer et doivent impacter la valorisation ;


- Un permis d’exploitation qui expire dans 2 ans et qui dépend d’une décision politique, peu favorable à l’activité exercée ;


- Une personne clé va quitter prochainement l’entreprise et avec elle une part importante du know-how pourrait s’évaporer  ;


- Le plus gros client menace de faire faillite.  Commencez chacune de vos valorisations par vérifier la robustesse du flux des revenus car c'est de lui dont dépend la survie mais surtout la croissance ;


- L’évolution technologique a été négligée, une mise à niveau importante s’impose et celle-ci requiert des investissements conséquents ;


- Un litige dont l’issue est incertaine mais si le worst case scénario se réalise, c’est sera l’arrêt immédiat de l’activité.  C’est un exemple où l’alternative idéale est l’acquisition du fonds de commerce (et non des actions), cela permet de laisser le passé derrière (dans l'entité qui lui appartient) et ne pas entraver le futur de l’activité. Sous réserve d’obtenir du vendeur les certificats fiscaux et sociaux,  essentiels à sauvegarder les intérêts de l'acheteur (car évite de le rendre solidaire du paiement de ces dettes du vendeur).


- Etc.


  1. LES ÉVOLUTIONS FISCALES


Vendeurs et acheteurs devront accorder une importance particulière à éviter qu’une partie du prix de vente ne soit requalifié, notamment en distribution de dividendes.


Dans quel cas de figure ? Lorsque la société dispose de liquidités excédentaires avec des réserves accumulées.  Dans ce cas, l’administration pourrait émettre le reproche que le vendeur n’a pas, préalablement à la cession d’actions, distribué des dividendes (soumis à 30 % de précompte mobilier).  


Par ailleurs,  le projet de réforme fiscale de 2025 prévoit  ;


- Une taxation de (max.) 10 % sur certains actifs financiers, en ce compris les actions d’une PME ;


- L'une des notes reprenait une volonté (ou un nouvel effet de la “peur du gendarme” ?) de taxer les ventes d’actions détenant des immeubles, de manière analogue à une (réelle) vente d’immeuble avec comme conséquence l’application, entre autres, des droits d’enregistrement. Un vieux démon qui ressurgit.


  1. QUELQUES CHIFFRES ÉVOCATEURS (*) 


Des récentes transactions en Wallonie ;


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QUE FAUT-IL EN RETENIR ?


Chaque entreprise qui change de mains aura connu plusieurs moments intenses d’émotions, dont les acteurs sont convaincus du bien fondé de leurs attentes, prérogatives et arguments.


Capter et intégrer dans la valorisation l'ensemble des soft skills de la PME reste un atout supplémentaire pour déterminer son prix réaliste.


Vicki TenHaken, dans son ouvrage "Lessons From Century Club Companies", souligne que la longévité des entreprises dépend de leur capacité à maintenir une mission forte, à cultiver une culture d'entreprise résiliente et à entretenir des relations solides avec leurs parties prenantes.


Si une formule de valorisation vous donne un aperçu rapide sur son prix potentiel,  accordez-vous les bienfaits d’une analyse approfondie mais surtout d'une seconde lecture des résultats projetés.


L’esprit humain se satisfait parfois trop vite de ce qu’il souhaite se voir confirmer,  à vous de doser la juste mesure entre prudence et audace.


Puisse ce qui précède vous être utile dans vos décisions et restez partisan des solutions réfléchies et guidées à 360° par vos conseils ainsi que par ceux qui ont expérimenté ce que

vous vivez.


Thomas DRAGUET ©│thomas@anticiper.tax ANTICIPER SRL,  Expert-comptable Conseil fiscal certifié +32 475 748 279 │www.anticiper.tax │www.vendezvotresociete.com




(*) Source rapport édité en 2025 de Wallonie Entreprendre “La transmission d’entreprises, chiffres-clés et tendances en Wallonie en 2024”.

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